Description du produit
8 classic albums from Paul McCartney, Linda McCartney and Wings being reissued worldwide on 180-gram heavyweight vinyl
Critique
L’idée répandue veut que les choses sérieuses concernant McCartney commencent avec Ram, album crédité au nom du couple. Une hypothèse qui donne tout son sens à un disque plus préparé qu’improvisé. Son maître d’œuvre, engagé dans une longue procédure judiciaire quant à la dissolution des Beatles, n’en récoltera pas les fruits dans l’immédiat. Une certaine suspicion continue de planer sur son travail – qui est loin d’être aplanie actuellement.
Composé et enregistré à l’automne 1970 et début 1971, l’album comporte douze titres de toute beauté qui lui garantissent un statut de chef-d’œuvre enfin réévalué trente ans après sa parution. Tout commence quand le couple McCartney embarque à bord du paquebot France à destination de New York. Dans les studios A&R situés à Manhattan, il met au point les dernières touches aux compositions et recrute sur place des musiciens susceptibles d’accompagner le projet. Après trois jours d’auditions, Paul et Linda recrutent le batteur Denny Seiwell et le guitariste David Spinoza. Ce dernier quitte rapidement les séances, se plaignant de l’ambiance – découvrant sans doute la force de travail dont est capable l’ex-Beatle. Il est aussitôt remplacé par Hugh McCracken. Le New York Philarmonic Orchestra appuie le groupe sur certains titres (« Uncle Albert/Admiral Halsey », « Long Haired Lady »).
Toutes proportions gardées, le rôle de Linda consiste à épauler son mari comme pouvait le faire John Lennon auparavant, modifiant une ligne de texte, conseillant telle option au lieu d’une autre ou confortant Paul dans ses choix, et participant vocalement à la majorité des chansons. C’est donc avec un grand étonnement que l’éditeur Lew Grade accueille la nouvelle des crédits de composition et de production qui n’étaient pas ceux prévus initialement (il ira jusqu’à menacer de poursuivre Paul en justice !).
Sur le plan musical, le résultat est somptueux. La suite de mélodies et arrangements concoctés par les McCartney est bien digne de son œuvre antérieure, à équivalence avec les titres « Back Seat Of My Car » et « Another Day » (sorti en simple et repris sur les rééditions CD) laissés de côté lors des séances Let It Be. Encore une fois, la double identité de Paul le rocker et mélodiste se glisse aisément dans les titres « Too Many People » ou « Ram On », « Monkberry Moon Delight » et « Dear Boy » faisant encore référence à John. Son ancien partenaire apprécie moyennement l’hommage et, parodiant la photo de pochette présentant Paul avec un bélier (ram), posera avec un cochon sur la carte postale livrée avec Imagine paru peu après, assorti de la réponse « How Do You Sleep ? ». Une autre image montrant deux coléoptères (beetles) en pleine action laisse les observateurs dubitatifs.
Fort heureusement, les termes de la rivalité ont depuis laissé place aux qualités intrinsèques du disque : le montage acoustique et symphonique audacieux de « Uncle Albert/Admiral Halsey », la ballade jazzy « Heart Of The Country », « Eat At Home » tout en réverbération rock’n’roll, l’ode romantique « Long Haired Lady » et les deux parties de « Ram On » – titre évoquant Paul Ramon, le pseudonyme utilisé lors d’une tournée (1961) et de sa collaboration à « My Dark Hour » du Steve Miller Band (album Brave New World). Pour les fans harccore, il existe une version orchestrale de l’album, arrangée par Richard Hewson et sortie en douce sous le nom de Percy « Thrills » Thrillington (Thrillington, 1977).
Loïc Picaud – Copyright 2019 Music Story