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Pourquoi les Beatles se sont séparés : histoire d’une fin inévitable

Derrière le choc de la séparation des Beatles en 1970 se cache une lente désintégration faite de tensions personnelles, artistiques et juridiques. Lennon, McCartney, Harrison et Starr, chacun à leur manière, ont contribué à cette fin inévitable, entre malentendus, usure et quête de liberté.

Il est une question que l’on continue de se poser, soixante ans après leur éclatante ascension : pourquoi les Beatles se sont-ils séparés ? À l’annonce du split en avril 1970, le monde semblait découvrir avec stupéfaction ce que les studios d’Abbey Road savaient depuis longtemps : l’aventure s’était éteinte bien avant d’avoir été officiellement annoncée.

Les raisons ? Elles sont multiples, entremêlées, parfois contradictoires. Mais toutes racontent une même histoire : celle de quatre garçons propulsés dans une spirale de célébrité et de génie, qui finirent, à force d’usure, de blessures et de conflits larvés, par ne plus pouvoir se regarder, ni jouer ensemble. Voici la chronique de cette lente désagrégation.

1. Une décennie brûlée par les deux bouts

Entre 1960 et 1970, les Beatles auront connu une intensité artistique, médiatique et humaine que nul autre groupe n’aura jamais expérimentée. Douze albums, plus d’un millier de concerts, des films, des conférences de presse, des tournées mondiales, des séances en studio quasi ininterrompues.

En une décennie, ils ont traversé toutes les métamorphoses : du groupe de reprises à la Cavern à l’avant-garde de Revolver, de l’euphorie de A Hard Day’s Night aux lamentos existentiels du White Album. Mais à cette vitesse-là, la machine ne pouvait que se fissurer.

« C’est presque un miracle que nous soyons allés si loin, » dira Ringo Starr plus tard. Et c’est vrai. Car au fond, la question n’est peut-être pas : pourquoi se sont-ils séparés ? Mais plutôt : comment ont-ils tenu si longtemps ?

2. Lennon, Yoko, et la sortie par l’amour

Si l’histoire retient souvent Yoko Ono comme la principale cause de la rupture, la réalité est autrement plus nuancée. L’irruption de Yoko dans l’univers sacré du groupe fut certes un choc de territoire, un bouleversement des dynamiques internes. Elle fut, comme le dira George Martin, « celle qui brisa le carré parfait ».

Mais Yoko ne fit qu’accélérer une fissure déjà existante. John Lennon, à l’orée des années 70, était un homme fatigué, désabusé, en quête de vérité personnelle. Avec Yoko, il découvre une autre manière de vivre, de créer, d’aimer. Il commence à s’éloigner du groupe comme on quitte un costume trop étroit.

« Quand tu rencontres la femme de ta vie, tu laisses tomber les copains du pub, » dira-t-il. « Je ne jouais plus au billard. Je ne sortais plus avec les gars. »

Ce désengagement progressif se manifeste par des absences en studio, un intérêt décroissant pour les projets communs, et un glissement vers l’expérimentation avec Yoko. Pour lui, la Beatlemania est une autre vie. Il n’aspire plus à faire partie d’un groupe, mais à vivre en paix avec celle qu’il aime.

3. George Harrison : trop longtemps dans l’ombre

Au sein du quatuor, George Harrison fut sans doute le plus frustré par la hiérarchie tacite Lennon/McCartney. Malgré son génie croissant, il restait cantonné à deux morceaux par album. Lors des sessions de Let It Be, cette frustration atteint un point critique.

Déjà ébranlé par des tensions musicales, Harrison s’irrite de la présence permanente de Yoko Ono en studio, et de ce qu’il perçoit comme un mépris des deux leaders pour ses compositions. Un jour de janvier 1969, il claque la porte après une altercation avec Lennon :

« Je me tire. Passez une annonce. Prenez quelqu’un d’autre. À plus dans les clubs. »

Même s’il reviendra quelques jours plus tard, l’essentiel est dit. George ne supporte plus la dynamique du groupe. Il sent que ses aspirations spirituelles, musicales, humaines n’ont plus leur place au sein des Beatles. Et il attend son heure. All Things Must Pass est déjà en germe.

4. Ringo Starr : le discret blessé

Ringo Starr, souvent perçu comme le plus neutre du groupe, quitte lui aussi les Beatles en 1968, pendant les sessions du White Album. McCartney, de plus en plus interventionniste, va jusqu’à jouer de la batterie à sa place sur certains titres. Ringo, blessé, s’éloigne.

« Je ne me sentais plus à ma place. Je pensais qu’ils étaient heureux ensemble et que j’étais de trop, » confiera-t-il.

Il revient au bout de deux semaines, accueilli par des fleurs déposées sur sa batterie. Mais la cassure est là. Même l’âme joyeuse du groupe se sent désormais en marge.

5. McCartney : leadership ou dictature ?

Paul McCartney, lui, tente coûte que coûte de maintenir le groupe en vie. Après la mort de Brian Epstein en 1967, il devient, par défaut, le leader organisationnel. Il pousse à la création de Magical Mystery Tour, puis du film Let It Be. Il structure, dirige, décide.

Mais cette attitude, qui aurait pu sauver les Beatles, finit par accélérer leur chute. Lennon lui reproche de diriger sans écouter. George le trouve dominateur. Ringo s’en éloigne.

Lennon le dira sans détour : « Après la mort de Brian, nous avons éclaté. Paul nous a dirigés… mais où cela nous a-t-il menés ? »

Et quand McCartney propose que le père et le frère de Linda deviennent les conseillers juridiques d’Apple, les tensions atteignent leur paroxysme. Lennon, Harrison et Starr penchent pour Allen Klein. Le groupe se fracture autour d’un conflit d’avocats.

6. Apple, Allen Klein, et la guerre d’intérêts

L’entreprise Apple, fondée par les Beatles pour gérer leur carrière et soutenir d’autres artistes, devient un gouffre financier et humain. Mal gérée, parasitée par les parasites, elle incarne les limites de l’utopie Beatle.

Allen Klein, homme d’affaires agressif, flairant le sang, convainc Lennon, Yoko, puis George et Ringo de lui confier la gestion. McCartney s’y oppose catégoriquement. Il ne fait pas confiance à Klein, et préfère les Eastman, juristes new-yorkais. Le groupe se divise en deux clans.

Les réunions sont houleuses. Les projets communs échouent. L’ambiance devient délétère.

« Pour sauver les Beatles et Apple, j’ai dû les poursuivre en justice, » dira McCartney. Et ce procès mettra fin définitivement au groupe.

7. L’héroïne et le lent effondrement de Lennon

Un facteur rarement évoqué, mais déterminant, est l’addiction de Lennon à l’héroïne à partir de 1968. Ce plongeon dans une spirale toxique marque un point de non-retour.

« Nous étions inquiets pour lui. Mais on ne savait pas comment l’aider, » dira Paul plus tard.

Ce mal-être profond, cette douleur invisible, sape ce qui reste de cohésion. Lennon se retire, se désintéresse, ne supporte plus la pression.

8. L’annonce de la fin

En réalité, Lennon quitte les Beatles en septembre 1969, bien avant que McCartney n’en fasse l’annonce officielle. Il le dit à Paul en pleine réunion : « Je quitte le groupe. Mais je ne voulais pas te le dire avant la signature du contrat. »

McCartney, abasourdi, garde le secret — jusqu’à ce qu’en avril 1970, il annonce la sortie de son album solo et confirme la rupture. Le monde entier l’apprend dans la presse. C’est la fin.

9. L’irréparable est fait

Il n’y a pas eu une seule cause, mais une accumulation de douleurs non dites, de malentendus, de blessures d’ego et d’usure. Chacun des quatre Beatles a quitté le groupe à sa manière. Aucun ne l’a voulu, mais tous l’ont rendu inévitable.

Yoko n’a pas brisé les Beatles. Elle a simplement cristallisé une séparation déjà amorcée. Klein n’a pas provoqué la rupture. Il en a profité. McCartney n’a pas tué le groupe. Il a tenté de le maintenir artificiellement en vie. Lennon ne l’a pas trahi. Il s’est libéré.

Épilogue : la séparation comme renaissance

À leur manière, tous les Beatles ont été soulagés. Ils n’étaient plus les Fab Four. Ils pouvaient enfin être eux-mêmes.

« C’était une libération, » dira George.
« C’était comme quitter l’école, » dira Ringo.
« C’était douloureux, mais c’était juste, » dira Paul.
« Je les ai fondés. Je les ai quittés. C’est aussi simple que ça, » dira John.

Le mythe est mort. Mais la musique, elle, reste.

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